Le coup de bélier est un phénomène de surpression qui apparaît au moment de la variation brusque de la vitesse d’un liquide, par suite d’une fermeture/ouverture rapide d’une vanne, d’un robinet ou du démarrage/arrêt d’une pompe. Cet article fait le point sur ses origines, et comment mieux s’en protéger.
Il est extrait du Guide Technique 2010 du Syndicat National des Entrepreneurs, concepteurs et Réalisateurs de Station de Pompage, rédigé par Claude FRANGIN. Il a été initialement publié sur ce site le 18 avril 2018.
Claude FRANGIN est un expert de renom en matière de régimes transitoires. Passionné par l’histoire de l’eau et de sa distribution, s’impliquant dans de nombreuses activités bénévoles tant pour mettre son savoir au service des populations de pays dans lequel le stress hydrique est grand que pour faire revivre des installations de pompage exceptionnelles, telle la pompe de Cornouaille à Lyon. Ingénieur de formation, expert judiciaire, consultant, il agit aussi comme formateur pour Eureka Industries.
Les régimes transitoires sont des phénomènes complexes qu’il n’est pas possible de traiter de façon détaillée, dans le cadre restreint de ce document. Les régimes transitoires dépendent directement de variations brutales de la vitesse d’écoulement dans la conduite. Ces variations de vitesse sont à l’origine de variations de pression (également appelées coups de bélier) qui peuvent être positives ou négatives.
Les régimes transitoires ou coups de bélier ont des causes très diverses, à titre d’exemple on peut citer :
Dans le cas d’une station de pompage, les régimes transitoires les plus dangereux sont consécutifs à une disjonction électrique (ou panne de courant).
Il est rappelé que, dans le cas d’une disjonction électrique, la présence d’un variateur de vitesse ou de démarreur-ralentisseur électronique est sans effet sur les transitoires et ne dispense pas, en conséquence, de l’étude et de l’installation de la protection anti-bélier.
L’amplitude maximale des coups de bélier, ΔH (en mètre de colonne d’eau), en absence de protection, est donnée par la formule d’Alliévi (comptée à partir du niveau statique) : ΔH = a.ΔVo/g
Avec
Exemple :
A noter que cette formulation est valable si le temps T de la variation de vitesse est suffisamment court ; en quelque sorte si le temps de variation de vitesse T est inférieur au temps To que met l’onde à faire un aller-retour sur la tuyauterie soit pour une longueur de conduite L, To = 2.L/a. Donc la formule est valable si T<To
La valeur maximale des coups de bélier est ainsi directement proportionnelle, d’une part à la variation de vitesse et d’autre part à la célérité des ondes (elles-mêmes dépendantes du type de matériaux de la conduite). Par ailleurs, plus la conduite est longue, plus celle-ci sera sensible au coup de bélier.
Dans le cas de manœuvre lente (T > 2.L/a), l’amplitude des coups de bélier est toujours proportionnelle à la variation de vitesse, mais inversement proportionnelle au temps de coupure du débit (ou au temps de manœuvre des équipements).
D’une manière générale, plus la vitesse d’écoulement est faible, moins important est le coup de bélier.
En cas d’arrêt brutal d’une station de pompage, l’alimentation de la conduite n’est plus assurée, alors que l’eau, contenue dans celle-ci, continue à se déplacer par son inertie propre (à titre indicatif il y a 500 tonnes d’eau par Km pour une conduite de DN 800).
La masse d’eau en mouvement s’arrêtant beaucoup moins vite que les pompes, la conduite en amont du refoulement est alors soumise à une surpression, tandis que la conduite en aval est soumise à une dépression.
Si la protection anti-bélier est absente ou insuffisante, les risques pour l’installation sont principalement :
Compte tenu des masses respectives d’eau en mouvement à l’aspiration et au refoulement, la protection concerne principalement la conduite en aval des stations de pompage (sauf pour les surpresseurs en réseaux).
Les dispositifs de protection sont spécifiques pour une sollicitation donnée, les plus courants sont :
Une protection combinée avec plusieurs dispositifs peut permettre une optimisation des équipements.
Les ballons hydropneumatiques sont très répandus et il existe presque toujours une solution ballon pour une protection de conduite lors d’une disjonction électrique.
Les ballons hydropneumatiques sont de type avec ou sans vessie (ou membrane).
Il est assez fréquent d’équiper les ballons hydropneumatiques d’un organe dissymétrique (tuyère, clapet percé ou échancré en eaux usées) ou d’une soupape anti-bélier pour lutter contre les surpressions consécutives au retour d’eaux en masse.
Les ballons anti-bélier à vessie seront préférentiellement de type vertical. Lors des régimes transitoires, un volume résiduel suffisant d’eau doit être respecté.
Ce type de protection permet des solutions alternatives dans le cas de certains transferts d’eaux usées ou pluviales. Les clapets d’entrée d’air doivent être spécifiques et de très faible inertie.
La protection par entrée d’air est généralement moins performante que celle d’un ballon, en raison de variations de pression plus brutales et de dépressions plus fortes. Il est fréquent de devoir installer un clapet d’entrée d’air supplémentaire en cours de réseau (suivant profil en long de la conduite). Ce type de protection nécessite des sorties d’air adaptées.
Dans le cas de profil long de conduite comportant un point haut, la combinaison d’un ballon et d’une entrée d’air en réseau permet, dans certains cas, de réduire le volume du ballon.
Règle 1 : Pression minimale admissible
En présence d’eau potable ou d’eaux destinées à la consommation humaine (avant traitement), aucune dépressurisation de la conduite n’est admise. La pression intérieure de la conduite doit être supérieure à la pression extérieure (niveau maxi nappe ou inondations). Dans le cas de l’assainissement, la dépression maximale admissible pour les conduites est de 5 mCE (en absence d’indication du fournisseur de la conduite).
Règle 2 : Opération et maintenance
La maintenance régulière des équipements de protection est indispensable.
Lors d’une opération de maintenance sur un appareil de protection anti-bélier, la station de pompage n’est plus protégée, elle est alors indisponible.
Un fonctionnement en mode dégradé de l’installation (à débit réduit) est souvent possible mais nécessite une étude préalable (cas des relevages d’eaux usées avec arrivée permanente d’effluents). Dans certains cas, notamment en zone urbaine les équipements de protection sont doublés ou dédoublés.
Des moyens de vidange des organes de protection sont à prévoir (avec en assainissement, la récupération des eaux usées).
Règle 3 : Positionnement des dispositifs de protection
Les dispositifs de protection doivent être au plus près de la conduite à protéger pour éviter tout retard lié au temps de réponse. Le raccordement sera conçu avec le minimum de perte de charge, les robinets d’isolement à passage intégral de type robinet-vanne seront à ce titre préférés aux robinets à papillon. L’accès et les moyens de levage (pour maintenance et/ou remplacement) sont à prévoir.
Règle 4 : Recommandations diverses
Pour la fourniture d’eau potable, les matériaux constitutifs des dispositifs de protection doivent être conformes à la réglementation. Les équipements exposés au gel doivent comporter une protection spécifique. Les compresseurs d’air doivent refouler de l’air non pollué. Les temporisations de redémarrage des pompes suite à disjonction doivent être adaptées au temps d’amortissement des régimes transitoires. Une prise de pression pour la vérification de l’efficacité de la protection est à prévoir. Dans le cas de l’installation d’un surpresseur en aval d’un disconnecteur, la conduite d’aspiration peut être soumise à une pression supérieure à la pression de l’alimentation en eau.
Les principaux documents à fournir pour une étude anti-bélier sont :
L’étude des transitoires se fait sur conduite neuve, au débit maxi de l’installation.
Dans tout projet de station de pompage, la protection anti-bélier doit donc être prise sérieusement en compte afin d’éviter des incidents aux conséquences graves. Cela impose des obligations au Maître d’œuvre (voir ci-dessus) et à l’entrepreneur.
« Les coups de bélier et la protection des réseaux d’eau sous pression » de M. Maurice Meunier (1980).
« Guide méthodologique d’études anti-bélier pour les réseaux d’eau » Brochure n°27 du FNDEA.
Source : Annexe 4 du Guide Technique 2010 du SNECOREP, Syndicat National des Entrepreneurs, concepteurs et Réalisateurs de Station de Pompage: www.snecorep.fr
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