Une technologie cryogénique permet de capter le dioxyde de carbone extrait directement des cheminées industrielles, sans solvants ni eau, avec un prototype testé sur une usine de chaux en Hauts‑de‑France visant une montée en capacité progressive. Découvrons ce que propose Revcoo.
Revcoo, start‑up française fondée en 2019, a développé CarbonCloud, procédé breveté de capture de CO₂ par cryogénie sèche. Contrairement aux techniques classiques basées sur l’absorption chimique (amines), cette méthode est 100 % électrique, sans solvant, sans eau, sans déchet et reposant sur un cycle cryogénétique intégré, ce qui limite l’impact environnemental local.
Le gaz de combustion est aspiré depuis la sortie de la cheminée, puis comprimé, déshumidifié et filtré pour isoler le CO₂. Le flux est ensuite acheminé vers une colonne de désublimation (NDLR : désublimer : passer de l’état gazeux à l’état solide sans passer par la phase liquide : exemple passer de la vapeur à la glace) d’environ 11 m de hauteur, où un spray d’azote liquide refroidit le mélange. Le CO₂ se transforme en glace carbonique, qui descend dans la colonne. Ensuite, il est liquéfié et stocké en cuve, prêt à être transféré ou valorisé.
La consommation énergétique est exclusivement électrique : selon Revcoo, le CO₂ capturé génère seulement 40 kg de CO₂ émis par tonne capturée, en raison du mix bas carbone français.
Actuellement, le démonstrateur industriel installé sur une usine de chaux à Haut‑Lieu (Nord), filiale d’Eiffage, capte environ 2 t/j de CO₂ ce qui correspond sensiblement au CO2 produit pour 2 tonnes de chaux (ratio caractéristique des sites de chaux). La production quotidienne est de 300 t de chaux. L’objectif est d’atteindre 20 t/j d’ici fin 2025‑2027, puis une capture de 95 % des émissions envisagée à terme.
Revcoo vise un déploiement industriel d’ici 2030 avec des unités capables de traiter jusqu’à 100 000 t/j (par équipement), et ambitionne de capter plus d’un million de tonnes de CO₂ par an, avec un chiffre d’affaires estimé à 200 M € en 2030.
La technologie est particulièrement adaptée aux émissions dites incompressibles, typiques des secteurs de la chaux, du ciment, de la verrerie ou encore des biomasses, où le CO₂ reste même si le combustible est dit propre. Elle peut aussi s’appliquer aux incinérateurs ou chaudières biomasse, captant le CO₂ biogénique. Ce procédé n’exige aucune modification des procédés de production existants, ce qui facilite sa mise en œuvre rapide et modulaire, même sur des installations de taille variée.
De plus, le gaz capté peut être valorisé industriellement : en industrie alimentaire (carbogaz), pharmaceutique, matériaux de construction ou synthèse de carburants verts (e‑fuels) pour l’aviation et le maritime. Sinon, il peut être séquestré géologiquement, par exemple via des puits en mer ou du stockage transfrontalier entre France et Norvège.
Le procédé non toxique, sans solvants ni rejets liquides, limite les contraintes réglementaires liées aux effluents ou produits chimiques. Le coût de capture est estimé par certains observateurs industriels à moins de 19 €/t, soit environ quatre fois moins que certaines solutions existantes, ce qui constitue un levier économique face aux quotas carbone sur le marché européen.
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