Et si une nouvelle génération de flammes industrielles à base d’hydrogène, créées à partir d’eau et d’électricité, était la solution aux problèmes énergétiques de l’industrie du 21eme siècle ? C’est une proposition de Nicolas Jerez, directeur de l’entreprise Bulane, proposant une technologie de chalumeaux à hydrogène alimentés par un électrolyseur mobile
Dans la course contre le réchauffement climatique, l’industrie n’a plus le choix. Sous l’égide des pressions réglementaires et des attentes sociétales grandissantes, les acteurs industriels sont contraints de s’adapter. Au cœur de cette transition réside la décarbonation des processus de combustion, traditionnellement alimentés par des énergies fossiles.
Le récent conflit en Ukraine n’a fait qu’accentuer la nécessité d’agir, exposant la vulnérabilité aux importations de gaz. À cet égard, l’électrification se positionne comme une option prometteuse, et en s’appuyant sur une innovation audacieuse, il est dorénavant possible de générer une nouvelle génération de flammes industrielles à base d’hydrogène, créées à partir d’eau et d’électricité. Une solution flexible, adaptable aux infrastructures existantes, qui réduit la dépendance aux combustibles fossiles tout en préservant l’intégrité des procédés industriels.
L’industrie joue un rôle majeur dans notre empreinte carbone, contribuant à hauteur de 18 % des émissions nationales de gaz à effet de serre. Cette part prépondérante trouve sa source principalement dans la combustion d’énergies fossiles, nécessaire pour générer la chaleur indispensable aux processus industriels. Une étude de l’Alliance Industrielle pour la Compétitivité et l’Efficacité Énergétique (Alliance Allice) parue en 2022 souligne que les usages thermiques non électriques du secteur industriel totalisent 240 TWh de consommation annuelle finale, soit 64 % de la consommation énergétique industrielle. Pour mettre en perspective, ces 240 TWh équivalent à la moitié de la production annuelle du parc nucléaire français. Ce constat interpelle : l’enjeu est clairement posé.
Heureusement, certains pays, à l’instar de la France, se sont fixé l’objectif de réduire drastiquement l’utilisation de ces énergies afin d’atteindre la neutralité carbone d’ici 2050.
La réduction de l’empreinte carbone industrielle, autrefois perçue comme une contrainte, apparaît désormais comme une véritable opportunité, et à court-terme une nécessité. Une chance de rompre avec la dépendance aux énergies fossiles et d’atténuer l’impact des fluctuations des coûts énergétiques, tout en se positionnant en tant qu’acteur clé du changement.
Ce changement de paradigme agit comme un catalyseur, incitant les entreprises à agir aujourd’hui pour éviter de futures contraintes, qu’elles soient sociétales ou géopolitiques. Ce constat est d’autant plus crucial que l’industrie s’écrit et s’inscrit dans le temps. Les investissements industriels sont des décisions à long terme. Négliger les tendances de fond équivaut à se retrouver piégé et rapidement dépassé. Cela souligne la nécessité, pour les industriels, de diversifier leurs sources d’énergie et d’éviter de s’appuyer sur une seule ressource. Les hausses de coûts et les perturbations d’approvisionnement en gaz et en électricité sont des rappels impérieux de cette réalité.
Dans ce contexte global, les décideurs industriels doivent agir. Mais comment opérer ce changement sans causer de perturbations majeures ? Comment pouvoir agir rapidement en limitant les impacts et en obtenant rapidement des résultats ?
L’approche “tout électrique” ne s’applique pas toujours de manière idéale. Actuellement, 70 % des procédés thermiques ne sont pas facilement électrifiables. Même lorsqu’une telle transition est possible, elle entraîne des coûts et des contraintes significatives, exigeant une modification profonde des processus et infrastructures alors même qu’une garantie de complète disponibilité électrique n’est pas toujours acquise.
Alors, comment allier la flexibilité du gaz à la vertu de l’électricité ? L’hydrogène est une solution possible. Cette alternative novatrice, fiable, durable et immédiatement disponible permet aux entreprises de s’adapter sans perturber le cœur même de leurs activités. Produit électriquement, ce gaz décarboné peut même être hybridé c’est à dire « mélangé » avec d’autres gaz permettant ainsi de piloter sa transition en douceur.
Son application dans l’industrie a déjà prouvé sa viabilité et sa pertinence. En utilisant l’hydrogène généré par l’électrolyse de l’eau alimentée en électricité décarbonée, on peut créer une flamme propre pour alimenter les brûleurs industriels, et ainsi apporter une source de chaleur zéro carbone.
L’implémentation d’hydrogène s’adapte facilement aux infrastructures industrielles existantes, tandis que sa production sur site élimine les besoins de stockage et offre un rendement énergétique optimal.
L’hydrogène étant consommé sur place il ne nécessite en effet aucun traitement supplémentaire, tels que le refroidissement ou la compression. Les industriels peuvent ainsi réduire considérablement leur empreinte carbone tout en adhérant aux objectifs environnementaux et sociaux qu’ils se sont fixés.
Utiliser l’hydrogène dans les processus de combustion émerge comme une voie réaliste, pragmatique et efficace pour de nombreuses industries. Cependant, au-delà de cette solution novatrice, il est crucial de retenir quelque chose de fondamental : la combustion en elle-même n’est pas le véritable obstacle à la décarbonation, mais bien les sources d’énergie sous-jacentes. C’est en orchestrant cette transition vers des sources plus propres et durables que nous pourrons, progressivement, réduire la part des combustibles fossiles dans le paysage industriel. Ainsi, en remodelant la façon dont nous concevons la combustion, nous déverrouillons le potentiel d’une transformation durable et bénéfique pour l’ensemble des usages thermiques qui émettent encore aujourd’hui plus de deux tiers du CO2 mondial.
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